Notre Cercle de Lecture réunissant plusieurs nationalités, les commentaires sont allés bon train...
*Le testament français,
d’Andreï Makine
Ed.
Gallimard – 1997
Le livre traite de la quête d'une identité. Alyosha grandit
au côté de sa grand-mère Charlotte, venue de France au lendemain de la première
guerre mondiale, et qui a vécu le restant de sa vie en Sibérie. Celle-ci évoque
régulièrement les événements qui ont marqué le début du 20ème siècle et qui se
sont mêlés à sa propre histoire. C’est ainsi qu’Alyosha apprend le Français,
qu’il croit d’abord être un patois de famille… Après quelques déboires à
l’adolescence, il finit par se réconcilier avec ses deux identités et se
réfugie alors dans les livres et la magie des mots, rendant hommage à cette
langue qui l'enchante et qui le relie pour toujours à sa grand-mère adorée,
conteuse hors pair, détentrice de bien des secrets.
Le roman,
proche de l’autobiographie, a été couronné par plusieurs prix littéraires et cela est amplement mérité,
c’est superbe ! – HL
God
save la France, de Stephen Clarke
Ed. Pocket – 2006
Avec un humour décalé et très anglais, ce
journaliste vivant en France depuis dix ans a écrit, par charité pour ses
compatriotes, ce petit guide de survie de l'expatrié en France. Imprimé à deux cents exemplaires, le guide est mis en vente sur son site Interne, remarqué par
quelques libraires et quelques journalistes, jusqu’à ce qu’un éditeur anglais
en acquiert les droits...
Mais que c’est drôle ! Les mots de notre langue et l'usage que l'on en fait sont souvent la cible de l'auteur, un vrai plaisir – CP
Outre-Manche, de Julian Barnes ; trad. Jean-Pierre Aoustin
Ed. Gallimard – 2000
Dire que Julian Barnes aime la France, c'est un peu enfoncer une porte
ouverte. Dans ses romans, ses personnages traversent souvent la Manche pour
venir voir ce qui se passe chez leur voisine qui les fascine et les intrigue
tant. Les dix nouvelles qui composent Outre-Manche se situent, elles, toutes en
France où des Anglais et des Anglaises, à différentes époques, voyagent,
vivent, travaillent, s'aiment ou même combattent. Jouant sur les registres les
plus divers avec l'habileté qu'on lui connaît, Barnes nous fait tour à tour
sourire, rire, rêver, trembler...
Le plus
frappant dans ce recueil de nouvelles est l‘habileté de l'auteur à changer de style au gré des
sujets traités. Soulignons au passage la qualité de la traduction – CP
Amkoullel, l’enfant peul, d’Amadouh Hampâté Ba
Ed. 84 – 2000 / coll. J’ai Lu Récit
Amkoullel, tel est le surnom que porte le jeune Hampâté Bâ quand, au
début du XXe siècle, il s'initie aux traditions familiales séculaires.
Fréquentant l'école française en même temps que l'école coranique, courant la savane
alors que des proches partent pour une guerre que l'on dit mondiale, mais qui
les concerne si peu, à l'écoute des grands maîtres de la parole, il devient
lui-même, à son insu, un griot, garant et dépositaire d'une civilisation orale
en pleine mutation. A la fois roman d'aventure, tableau de mœurs et fresque
historique, ce livre restitue dans une langue savoureuse et limpide toutes les
richesses, les couleurs et la vie du grand récit oral africain.
Lorsque
les tirailleurs de la guerre de 14 rentrent au pays, c’en est fait du mythe de l’homme
blanc ! Dans les tranchées, ce dernier a perdu de sa superbe, il est sale, il a peur, noirs et blancs se valent... Cependant, au moment de toucher leur pension, force est de constater que celles des blancs vaut le double de celles des noirs… Mais l’auteur fait la part des choses et il rend justice
à la langue française, qui s'est distinguée comme un moyen d’ouverture et de
communication entre les ethnies. Ce livre est tout à fait remarquable – AML
*Le
ventre de l’Atlantique, de Fatou Diome
Ed. Librairie Générale
Française – 2005
Salie,
l’héroïne de ce roman largement autobiographique est née sur l’île de Niodior,
à l’embouchure du fleuve Saloun dans un village de pêcheurs. Par son courage,
sa détermination, son travail acharné, elle réussit à faire de brillantes
études et devient docteur ès Lettres de l’université de Strasbourg. La famille
restée au Sénégal attend tout de Salie, auréolée de gloire pour sa réussite et
surtout de grande richesse supposée.
Le
petit frère, Madické, veut venir en France pour entrer dans une équipe de foot,
sa passion, et de là intégrer l’équipe de l’A.C. Milan, son rêve.
Le
roman repose sur l’opposition entre la vision de Salie, réaliste parce que
vécue : difficultés de vivre en France, difficultés financières, rejet de
la population, climat insupportable… et la vision irréaliste, idéalisée, rêvée
de Madické. Les appels téléphoniques entre eux mettent en lumière leur
incommunicabilité : Madické attend les résultats du dernier match de foot,
elle attend qu’on lui donne des nouvelles de sa famille, lien indispensable qui
la relie à Niodior.
L’auteur écrit dans un
style très fluide, incisif, avec des pointes d’humour grinçant ; poétique
lorsqu’elle évoque des paysages de Niodior, émouvant lorsqu’elle donne vie, en
quelques touches aux habitants de l’île.
Bon
roman, agréable à lire, qui révèle un auteur digne d’intérêt. Le roman n'est pas sans rappeler "Americanah", de Nogozi Adichi, que nous avons évoqué le mois dernier - N.M.
*Debout-payé,
de Gauz
Ed. Nouvel Attila – 2014
«… rester debout toute
la journée dans un magasin, répéter cet ennuyeux exploit de l'ennui, tous les
jours, jusqu'à être payé à la fin du mois. Debout-payé. »
Nous suivons le
parcours de trois africains, tous vigiles : Ferdinand, Ossiri et Kassoum, des
années 60 à nos jours, rythmés par les changements de politiques, l'apparition
de la carte de séjours, la création du statut de sans-papier, les conséquences
du 11 septembre 2001 sur leurs conditions de travail.
Le récit est ponctué par des interludes : les choses vues, entendues, et pensées, lorsque Gauz lui-même travaillait comme vigile au Camaïeu de Bastille et au
Sephora des Champs-Elysées - un portrait de la société française, drôle, riche et sans concession.
La construction du récit est peu ordinaire et donne au livre un caractère d'oralité. C'est drôle et édifiant. A coup sûr, nous regarderons les vigiles qui nous regardent
autrement… - GA
Les carnets du Major Thompson, de Pierre Daninos
Ed. Le livre de poche – 1967
Abandonnant
la chasse au tigre, le major W. Marmaduke Thompson décide d'explorer la jungle
française et consigne ses observations sur les autochtones, leurs
comportements, leurs manies, leurs qualités, leurs défauts...
Les anglais étant les meilleurs ennemis des français, l'auteur ne se retient pas de donner son propre
avis sur le texte du Major Thompson dans les notes de bas de pages souvent
surprenantes et drôles ;-)
Un
petit chef-d’œuvre d’humour britannique, au point qu’on a du mal à croire qu’il
ait été écrit par un français - SV
Voyages à travers la France et l’Italie, de Tobias George Smollet
Ed. José Corti -1994
L'ouvrage a été publié la première fois en 1766, au retour du Dr Tobias Smollett en Angleterre,
après trois années passées sur le continent. Il s’agit d’une série de lettres écrites à
ses médecins et amis, dans lesquelles l’auteur fait une critique acerbe des français - aubergistes, douaniers, parisiennes, etc., au point que même ses
compatriotes en étaient choqués. Mais si Smollett n’aimait guère les français, il a su apprécier avant l’heure
la côte d’Azur, dont il est dit qu'il en fut le « découvreur », à une époque où la région n'était guère en vogue. Smollett était un adepte des bains de mer...
Une caricature de l’esprit chauvin ?
– SV
Une année en Provence, de Peter Mayle
Ed. Seuil – 1996
Le temps d’une saison, l’écrivain anglais Peter Mayle tombe
sous le charme de la Provence. Dans un style inimitable, mêlant l’humour et la
tendresse, il nous peint les saveurs d’un village du Lubéron :
Amédée et ses formules chantantes, la truffe et les délices de la table,
l’énergie chaleureuse des terrasses de café, la sieste et le bon vin… Un voyage
qui sent bon le Sud.
Caricatural à souhait,
mais sans méchanceté et somme toute sympathique. Rien à voir avec la série télévisée
qui en a été tirée par la suite, qui allait vraiment trop loin dans la caricature, au point que l'auteur s'est mis à dos ceux qui l'avaient si bien accueilli - MM
Les
français aussi ont un accent, de Jean-Benoît Nadeau
Ed.
Payot – 2004
Françaises, Français :
le Québécois Jean-Benoît Nadeau vous a compris ! Voici, en vingt-deux chapitres
hilarants et lumineux, le récit de ses découvertes et de ses coups de gueule :
comment il va devenir le soixante-septième miraculé de Lourdes, prouver
mathématiquement l'existence de José Bové, percer le mystère de la crotte de
chien à Paris, célébrer Halloween à la normande, changer de millénaire par
trois fois...
Bien qu'originaire de l'Amérique des grands froids,
lui n'est pas venu restaurer une maison en Provence. Il avait mieux à faire. Sa
mission impossible de deux ans : découvrir si les Français résistent à la
mondialisation. Aussi porte-t-il sur leur pays le regard d'un anthropologue
débarquant chez les Yanomanis de l'Amazonie inférieure. À cette différence près
que la France n'est pas l'Amazonie et que l'auteur n'est pas un journaliste
comme les autres.
L’auteur est obnibulé par notre rapport au passé, de là à nous taxer d’archaïsme… ;-) Sympa et salutaire ! - SW
*Les titres précédés d’un astérisque sont disponibles à la bibliothèque.
Le prochain Cercle de Lecture se réunira le vendredi 3 avril à 20h00
avec pour thème : "Un auteur : Romain Gary, seul romancier à avoir reçu deux fois le Prix Goncourt..."