samedi 17 mai 2014

De bien drôles d'enfants se sont invités à l'Heure du conte

Nous avons changé le thème de l'Heure du Conte in extremis, car notre kamishibaï s'est avéré beaucoup trop complexe pour notre jeune public. C'est donc une jolie trouvaille, un conte ivoirien, qui a donné le ton.


L'enfant fleur, un kamishibaï de Vincent Wagner
Editions Callicéphale

Dans un village d’Afrique, la sorcière de Molobe prédit à Solène que son fils sera différent des autres enfants. Elle devra le protéger de l'eau de pluie. Nanéma grandit et ses talents de musicien séduisent le pays tout entier. Le jour de son mariage, les nuages eux-mêmes sont envoûtés par sa musique et ce qui devait arriver arriva...

Notre deuxième conte abordait la question du droit de s'aimer, de choisir et d'être libre...

Le fils des géants, de Gaël Aymon ; ill. Lucie Rioland
Ed Talents Hauts - 2013
Un roi et une reine eurent un garçon si petit qu’ils ne voulurent pas le garder. Ils le mirent dans un dé à coudre qu’ils déposèrent dans la rivière. Le dé s’échoua près d’une grotte habitée par deux géants qui recueillirent l’enfant et lui donnèrent leur force pour qu’il grandisse, leurs mots pour qu’il n’ait plus peur et leur amour pour qu’il soit heureux. Des années plus tard, le roi et la reine, surpris par un orage, s’abritent chez les géants et reconnaissent leur fils grâce au dé d’or qu’il porte au cou…

Avant de poursuivre, nous nous sommes essayés pour la première fois aux devinettes et c'est dans cette complicité que nous avons introduit notre dernière histoire.


Le petit d'homme, de Jeanne Willis ; ill. Tony Ross
Ed. Hachette Jeunesse - 1996

Azor a choisi son cadeau d'anniversaire : il veut un petit d'homme. Hélas toute la famille y est opposé : sale, impossible à dresser, pas propre sont les verdicts implacables. Pourtant dans le parc, une foule de chiens promènent des humains et Azor a aperçu un petit rouquin tout mignon qui a l'air tout seul...

jeudi 15 mai 2014

Ah ! les crocodiles

C'était la dernière séance de l'année pour les Bébés-lecteurs.
Moins nombreux qu'à l'ordinaire, soleil oblige..., ils étaient une dizaine autour du tapis.

      Ah ! les crocodiles, inspiré de l'album de Stéfany Devaux
    Ed. Didier jeunesse - 2003
       
 Ce raconte-tapis se fait en chanson.
      
Les progrès des enfants sont prodigieux et il est aisé de repérer ceux qui rentreront en maternelle à la fin de l'été : téméraires, ils s'essayent à chanter, reproduisent les mimiques et jouent de leur doigts.
Ils ont eu droit de manipuler les animaux, les ont nommés un à un, et ont consenti à s'en séparer...
L'histoire a été suivie de plusieurs jeux de doigts, et là encore les petits pouces se sont levés et ont remué.


Le dernier quart d'heure est réservé aux livres de bibliothèque. Et aujourdh'ui nous avons eu une petite surprise avec un livre à pages cartonnées :



Je cherche plein de choses, de Jean Marzollo
Editions Millepages


Un petit garçon qui avait choisi ce livre savait très bien repérer l'objet demandé parmi une multitude d'objets, jusqu'au moment où il lui fallut associer l'objet et sa silhouette.


Et là, silence interloqué !
 La silhouette n'évoque rien à l'enfant de cet âge...

 Nous convenons à l'avenir de faire participer quelques assistantes maternelles à cette animation et nous nous donnons rendez-vous à l'automne. 

lundi 12 mai 2014

La grande guerre

Marie-Claude a découvert dans son grenier un carton de lettres du front, écrites aux enfants, aux parents, au frère... Ces lettres lui ont soufflé le thème de notre Cercle de lecture et nous lui avons emboîté le pas, dans une soirée riche en émotions, et avec une large palette de livres :

La flamme au poing, de Henry Malherbe
Ed. Hardpress Publishing – 2013
Un roman d'un patriotisme ardent, à partir de l'expérience de guerre de l'auteur, lieutenant au 43e R.A.C., qui sera gazé, hospitalisé jusqu'à la fin de la guerre et handicappé à vie. L’auteur a écrit une œuvre qui vaut surtout pour sa qualité littéraire, cet objectif avoué l'a libéré de tout devoir d'exactitude. Le livre publié en 1917 aux éditions Albin Michel a reçu la même année le prix Goncourt. Le récit s'organise en trois parties : le souvenir des temps de paix, l'amour qui s'exprime dans la musique et dans les liens qui unissent ceux du front, la mort.
 Le style a un peu vieilli, mais le lyrisme reste agréable et le vocabulaire est précis. Certains passages sont vraiment beaux - MCH

Le Feu, de Henri Barbusse
Ed. Folio - 2007
A la déclaration de guerre, Henri Barbusse a 41 ans. Pourtant pacifiste et dispensé de service actif en raison d’une santé délicate, il met un point d’honneur à se faire mobiliser en première ligne, où il sera un soldat exemplaire. Blessé fin 1915, c’est à l’hôpital qu’il écrit l’un des premiers grands témoignages littéraires sur l’horreur des combats. Dès sa parution en feuilleton, puis en livre, l’ouvrage remporte un énorme succès et obtient le prix Goncourt 1916. Barbusse y crie son indignation face au martyre vécu par «ces pauvres gens jetés sur ce champ de douleur» et transcrit avec un soin scrupuleux «les paroles qui jaillissent de leur meurtrissure et de leur mal, les paroles qui saignent d’eux.» Profondément marqué par le conflit, l’écrivain sera ensuite fasciné par l’une de ses principales conséquences : la Révolution bolchevique. Il sera l’une des grandes figures du Parti communiste et mourra en 1935 lors d’un voyage à Moscou.  
J’ignorais tout de Barbusse, qui n’était pour moi qu’un nom de rue. Et pourtant… Sous sa plume, Volpatte, Lamuse, le caporal Bertrand et tous ses autres frères d’armes nous deviennent étonnamment proches. Il sait comme personne les faire parler avec toute la gouaille de l’argot des tranchées. Mais la plupart ne survivront pas au terrifiant chapitre XX, lui aussi intitulé 'Le feu'. Car la charge d’infanterie qu’il décrit devient une hallucinante plongée en enfer. Autre passage à ne pas manquer : l’ultime phrase du premier chapitre. Deux ans avant la Révolution d’octobre, elle a d’étranges accents prémonitoires et annonce déjà l’engagement ultérieur de Barbusse : «L’avenir est dans les mains des esclaves, et on voit bien que le vieux monde sera changé par l’alliance que bâtiront un jour entre eux ceux dont le nombre et la misère sont infinis.» - SW

*L’adieu aux armes, de Ernest Hemingway
Ed. Gallimard / Folio – 1972
Frédéric Henry, un jeune Américain, s’est porté volontaire pour conduire des ambulances sur le front d'Italie, tout comme l’auteur lui-même... Le livre retrace les combats dans les montagnes, mais se garde de glorifier la guerre. Blessé, le héros s'éprend de son infirmière Catherine Barkley et finit par déserter. Avec Catherine, enceinte, il tente de fuir la guerre et de passer en Suisse, où le destin les attend.
 Je suis étonnée à la relecture de ce livre d’y trouver plus de descriptions de guerre que dans mon souvenir. Le thème de ce soir m'aura sans doute sensibilisée à tout un pan que j'avais escamoté à ma première lecture. L’histoire d’amour servirait-elle d'échappatoire ? - SV

Carnet de route d’un gosse des tranchées, de Léon-Antoine Dupré
Ed. Michel Lafon – 2013
 
Ce carnet de route couvre un peu plus de deux années de la Première Guerre mondiale, de mai 1916 à juillet 1918. Copie fidèle des lettres que Léon-Antoine Dupré a écrites à ses parents pendant cette période, il a été mis en pages et illustré par ses soins trente ans plus tard, non pour être publié, mais à l’intention de son fils unique pour se justifier d’avoir cherché à le dissuader de s’engager en 1944, afin de lui éviter de voir trop vite “la Misère et la Mort”. 
Le cri d'un père qui aurait tant voulu que cela ne recommence pas...  SV

*Notre mère la guerre, de Kris ; ill. Maël
Ed. Futuropolis – 2009 à 2012
Janvier 1915, au cœur de la Champagne pouilleuse. Cela fait six mois que la guerre charrie ses milliers de morts quotidiens. Mais, sur le front, ce sont trois corps de femmes qui effraient l'état-major. Trois femmes froidement assassinées. Sur leurs cadavres, à chaque fois, une lettre d'adieu - une lettre écrite par leur meurtrier. Une lettre cachetée à la boue des tranchées, sépulture impensable pour celles qui sont les symboles de la sécurité et du réconfort, les ultimes remparts de l'Humanité. Des femmes... Un gendarme est chargé de l'enquête, une enquête policière complexe et pleine de rebondissements. Un récit précis et documenté du quotidien des poilus, de la vie de l'arrière.
Voilà un excellent polar, admirablement mis en scène, avec des dessins travaillés, fourmillant de détails et le tout dans des tons sépia. Ce pourrait être très sombre, mais une histoire d'amour illumine d'espoir cette période de l'histoire. L'adaptation sur grand écran est en cours - MM

Les croix de bois, de Roland Dorgelès
Ed. Librairie Générale française / Le Livre de Poche – 2010
Les croix de bois sont celles bricolées en hâte pour les Poilus tombés au champ d'honneur. Roland Dorgelès, engagé volontaire, nous livre un témoignage exceptionnel, avec un réalisme parfois terrible mais toujours d’une généreuse humanité, la vie des tranchées nous est décrite dans toute son horreur et aussi sa bouffonnerie, son quotidien et ses moments d’exception.
Une grande humanité se dégage de ce récit très émouvant. Le livre n'est pas sans rappeler le "Voyage au Bout de la Nuit" de Céline, qui paraîtra en 1932 - MM

La vie et rien d'autre, un film de Bertrand Tavernier
avec Philippe Noiret et Sabine Azéma


Au lendemain de la guerre de 14, le commandant Dellaplane (Philippe Noiret) est chargé de recenser les soldats disparus. Il rencontrera sur son chemin deux femmes : Irène, une dame du monde exigeante (Sabine Azéma) arrivant dans sa limousine à la recherche du mari disparu, et Alice, une jeune femme (Pascale Vignal) qui cherche son amoureux.
Pour raisons de déontologie, le commandant s'oppose à sa hiérarchie lorsqu'elle lui ordonne de procéder à la recherche de la dépouille du poilu qui sera le soldat inconnu sous l'Arc de triomphe. Bien que troublé par le charme froid d'Irène qui n'arrête pas de croiser sa route, il poursuit sa tâche et va bientôt comprendre pourquoi les deux femmes, après un long parcours à la recherche de leurs hommes, vont se retrouver près d'un tunnel effondré où est enseveli un train sanitaire disparu.
Un film évoqué par plusieurs d'entre nous et chaudement recommandé...

Paroles de poilus, de Jean-Pierre Guéno
Ed. Editions 84 - 2013 
Ils avaient dix-sept ou vingt-cinq ans, ils étaient palefreniers, boulangers, colporteurs, ouvriers ou bourgeois. Voyageurs sans bagages, ils durent quitter leur femme et leurs enfants, revêtir l'uniforme mal coupé et chausser les godillots cloutés... Sur huit millions de mobilisés entre 1914 et 1918, plus de deux millions de jeunes hommes ne revirent jamais le clocher de leur village natal. Plus de quatre millions subirent de graves blessures.
Huit mille personnes ont répondu à l'appel de Radio France visant à collecter les lettres de ces poilus. Cet ouvrage en présente une centaine. Des mots écrits dans la boue et qui n'ont pas vieilli. 
Ce que j'ai relevé, c'est l'absence de haine contre l'ennemi. L'indignation et la colère contre l'administration prévalent, le fatalisme et la résignation. Les soldats attendent la mort et leurs lettres font preuve de beaucoup retenue pour ne pas heurter ceux à qui elles sont destinées - HL

*A l’ouest rien de nouveau, de Erich Maria Remarque
Ed. Le livre de Poche – 1973
Le témoignage d'un simple soldat allemand de la guerre de 1914-1918. « Quand nous partons, nous ne sommes que de vulgaires soldats, maussades ou de bonne humeur et, quand nous arrivons dans la zone où commence le front, nous sommes devenus des hommes-bêtes ? » Ce roman pacifiste, réaliste et bouleversant connut dès sa parution en 1928, un succès mondial retentissant. Il reste l'un des ouvrages les plus forts dans la dénonciation de la monstruosité de la guerre.
Pour contre-balancer le témoignage des poilus, j'ai souhaité lire un témoignage allemand. Une fois encore, la haine y est absente, et ce sont les mêmes expériences, la même colère, la même déception !... -  HL

*Dans la guerre, de Alice Ferney
Ed. Editions 84 – 2006
En août 1914, quand Jules est appelé sous les drapeaux, Félicité se persuade comme tout le monde que l'absence sera brève. Mais longue en vérité sera l'attente pour le couple landais. Dans le récit de leur séparation et des violences qu'ils affrontent, le chien Prince tient un rôle essentiel, lui qui traverse toute la France pour retrouver son maître au front.
Au fil de pages haletantes, d'où monte le vacarme d'un monde chancelant sous le sang et le désespoir, Alice Ferney évoque les nouveaux et précieux liens qui se tissent entre compagnons d'armes, entre mari et femme, entre parents et enfants, entre l'homme et l'animal.
Une histoire traitée avec réalisme et bien documentée. L'originalité du livre tient aux liens qui unissent un jeune soldat et son chien - liens d'amour et de connivence dans un contexte de violence. Serait-ce là une métaphore d'autres liens, non exprimés ?

Et de nous signaler un titre qu'elle regrette de n'avoir pas eu le temps de lire et qui figure sur la liste de notre prochaine commande :
*Blanche Maupas - La veuve de tous les fusillés, de Macha Séry
Ed. L’archipel - 2009
Mars 1915. Le ministère de la Guerre informe Blanche Maupas institutrice au Chefresne (Manche), que son mari Théophile, caporal dans les tranchées, " a été passé par les armes après dégradation militaire pour refus d'obéissance ". " Mort ignominieusement ", précise le document officiel. Une autre femme se fût sans doute réfugiée dans l'obscurité et l'oubli. Blanche, elle, s'insurge : pour elle, l'exécution de Théo est un crime, Seule face au mensonge patriotique et militaire, elle n'aura de cesse d'obtenir sa réhabilitation. Malgré l'opprobre quasi général, elle accumule les témoignages, reconstitue les faits, se bat pour qu'éclate la vérité sur l'affaire des quatre caporaux de Souain, fusillés pour l'exemple... Le charisme de Blanche, son talent oratoire font des miracles. Bientôt rejointe par la Ligue des droits de l'homme, les syndicats d'instituteurs, le Grand-Orient de France, de nombreuses associations d'anciens combattants, Blanche la révoltée n'est plus seule. C'est désormais une héroïne qui soulève l'opinion publique... Macha Séry et Alain Moreau ont reconstitué la véritable histoire de cette rebelle et de son combat.

*Cris, de Laurent Gaudé
Ed. Actes Sud – 2004
Dans les tranchées où ils se terrent, dans les boyaux d'où ils s'élancent selon le flux et le reflux des assauts, ils partagent l'insoutenable fraternité de la guerre de 1914. Loin devant eux, un gazé agonise. Plus loin encore retentit l'horrible cri de ce soldat fou qu'ils imaginent perdu entre les deux lignes du front : " l'homme-cochon ". A l'arrière, Jules, le permissionnaire, s'éloigne vers la vie normale, mais les voix des compagnons d'armes le poursuivent avec acharnement.
Il s'agit du premier livre écrit par Laurent Gaudé : un récit court, des phrases courtes, un rythme haletant et une construction originale, où tour à tour les protagonistes s'expriment dans un monologue intérieur qui fait progresser le récit. Ce pourrait être la énième histoire qui nous est rapportée, le même constat que dans les livres précédents, mais avec quel talent Gaudé nous embarque dans la démence de ceux qui ne se remettront jamais de la folie des canons  ! - GA

Bien qu'il n'ait pas été présenté ce soir, il ne sera pas dit que l'on passerait sous silence l'excellent Goncourt 2013 :
*Au revoir là-haut, de Pierre Lemaître
Ed. Albin Michel - 2014
 Sur les ruines du plus grand carnage du XXe siècle, deux rescapés des tranchées, passablement abîmés, prennent leur revanche en réalisant une escroquerie aussi spectaculaire qu'amorale. Des sentiers de la gloire à la subversion de la patrie victorieuse, ils vont découvrir que la France ne plaisante pas avec ses morts...
Voilà un roman macabre et jubilatoire, qui dénonce l'illusion de l'armistice, l'Etat qui glorifie ses disparus et se débarrasse de vivants trop encombrants, l'abomination érigée en vertu. Et ceci avec tout le savoir faire de l'auteur de romans policiers, car Pierre Lemaître n'est pas un perdreaux de l'année...

Pour aller plus loin : une interview de l'auteure de la "Petite bibliothèque du centenaire".

 *Les titres précédés d'une astérisque sont disponibles à la bibliothèque. 
   Le prochain Cercle de Lecture se réunira le vendredi 13 juin à 20h00
Le sujet en sera :
 "La peur"...